Historique
Il nous faut bien évidemment nous replonger en quelques lignes dans l’histoire de la machine ! Le machinisme permet le grand bouleversement de l’industrie. Le XIXe siècle étant le siècle de la révolution industrielle (locomotive dès 1804) !
Avec le Taylorisme (de l’ingénieur américain Frederick Winslow Taylor, 1856-1915) et son concept de travail organisé et rationnel grâce à la machine puis son application concrète avec le Fordisme (Henry Ford, 1863-1947 ) et le travail à la chaîne inspirée des abattoirs en 1895, nous sommes au cœur de la transformation du travail de l’homme.
L’homme soumis à une cadence nouvelle liée à la machine, devenu plus productif.
L’homme qui disparaît derrière la technique : la déshumanisation est lancée et le rêve d’Hubris se développe. L’homme devient bien entendu interchangeable comme les boulons de la machine, ; il faut produire plus pour la croissance ; arraché à la terre le paysan vient alimenter les usines pour devenir un ouvrier parmi tant d’autres.2
Quelques Illustrations artistiques nous rappellent ces temps : Charlie CHAPPLIN avec « Les temps modernes » ou encore « Métropolis » de Fritz LANG de 1927 avec ces ouvriers qui travaillent dans les souterrains d’une fabuleuse métropole de l’an 2026. !3
Alors certes, les temps ont bien évolué en tout cas pour l’Occident, mais de nouveau la place de la machine dans notre quotidien est questionnée
L’IA va t elle nous remplacer ? Et finalement, si elle le peut, pourquoi nous en offusquer ?
Nous serions libérés de taches sans intérêt, répétitives, nous pourrions nous consacrer à un travail dont la valeur serait plus grande ou même à tout autre chose. Voilà ce qui nous est opposé lorsque nous manifestons une certaine réticence.
Nous libèrerons du temps !
La question n’est pas technique. Il ne s’agit plus de savoir si cela est possible La question est sociétale et éthique. Le voulons – nous ?
Nous avons déjà connu de grands bouleversements liés à l’introduction des machines, comme dit plus haut, l’homme a été soulagé pour bien des travaux même si d’autres problèmes physiques apparaissaient comme par ex les cadences liées au travail sur chaîne et des TMS qui nécessitaient alors une attention soutenue.
Mais ici, nous sommes au-delà. Peut-être y aura -t -il des troubles d’ordre cognitif ? du stress, de l’angoisse face à une telle « intelligence » ?
Allons -nous être réellement remplacés ? Ou finalement, l’IA ne sera-t-elle que notre béquille « intellectuelle » que nous actionnerons selon nos désirs ? La paresse nous gagnera-t-elle ?4
Etre remplacé c’est disparaitre, se dissoudre…5
Pourquoi avons-nous besoin de l’IA ?
Tout d’abord, avant même de se poser la question de l’adaptation comme nous savons le faire, telle que : il faudra se former, il faudra s’informer ; il faudra sensibiliser etc. nous aurions dû nous demander simplement si nous en avions besoin, réellement besoin et pour faire quoi de mieux, de plus ?
Une intelligence AR – TI – FI – CIELLE, l’IA n’est qu’une machine à raisonner avec des algorithmes ; son « moi » est mathématique, statistique ; sans surmoi…
Nous l’utilisons depuis longtemps presque sans le savoir ; pour choisir notre chemin par exemple, ou plutôt, c’est elle qui nous le propose.
Nous savons également tout ce qu’il est possible de faire avec une IA comme de fausses photos, de fausses vidéos, de fausses réunions TEAMS (par usurpation d’identité !).
Mais dans notre travail, sommes-nous certains d’en avoir l’utilité ? Si nous gagnons du temps, nous aurons de toute façon à remplir le temps gagné par d’autres tâches … il nous faudra en plus vérifier le travail produit par l’IA qui, pour l’heure, synthétise et agglomère tout ce qu’elle trouve sur le net, sans compter les hallucinations.
Serons-nous libérés ? Aurons-nous plus de sens dans notre travail ?
De toutes les façons l’Etat est déjà largement engagé6 . C’est la nouvelle course aux étoiles.
Voilà donc la situation ! Nous ne reculerons pas. Il y aura bien évidemment ceux qui pourront s’adapter et les autres : Nous avons eu la fracture numérique, il y aura la fracture de l’IA, c’est inévitable.
Ce ne sont que des fractures sociales supplémentaires bien entendu.7
L’IA lorsqu’elle pourra prendre des décisions pour parvenir à ses fins, fixées pour l’heure encore par l’Homme, ne sera plus un outil comme un autre mais un agent auprès de nous.
Qu’en est-il dans les services publics ?
Dans les services publics, l’IA est déjà utilisé depuis 2017 , ALBERT8 a été mis en place il y a peu . La DGFiP utilise l’IA pour optimiser ses processus, en particulier dans le cadre de la lutte contre la fraude fiscale ; et la DDT de l’Hérault contribue à une meilleure efficience de la protection du littoral avec le projet AIGLES.
Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) met en garde en faisant référence à l’article15 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 : « La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration ». En d’autres termes, même rendue par une IA, une décision publique individuelle doit pouvoir être expliquée aux citoyens.
Or, les modèles de langage selon le CESE « ne permettent pas, aujourd’hui, de retracer la manière dont un résultat a été produit, les raisons pour lesquelles telle décision a été prise par l’algorithme ou de détecter des réponses fausses ».
L’IA, toujours selon le CESE, ne peut remplacer l’humain dans nos services publics ; Le Label Marianne représente un engagement fort des services publics à fournir une qualité d’accueil exemplaire et les relations humaines sont essentielles.
Un excellent ouvrage rédigé par des collègues de la CFTC intitulé : « La grande illusion de l’IA » aux éditions de l’Onde, donne un exemple en page 106 d’une IA (GPT4) bloquée par le CAPTCHA d’un site ; situation que nous connaissons vu que le CAPTCHA est justement là pour s’assurer que nous ne sommes pas une IA !
Celle-ci (l’IA) a « judicieusement » réussi à passer outre, en indiquant qu’elle avait besoin d’aide en répondant simplement à la question posée : « pourquoi avez-vous besoin d’aide ? » elle avait besoin d’aide car elle était déficiente visuelle ! Ce qui est exact fondamentalement. De ce fait elle a pu passer la barrière de sécurité et continuer sa progression.
Le comité d’éthique fut particulièrement inquiet…
La CFTC attachée aux valeurs humanistes et détournée du matérialisme, est confrontée encore une fois à bien des interrogations philosophiques voire plus .
2 Destruction créatrice de J. SCHUMPETER
3 Ils assurent le bonheur des nantis qui vivent dans les jardins … Un androïde mène les ouvriers vers la révolte.
4 9 étudiants en droit sur 10 utilisent l’IA pour réviser leurs examens.
5 Le CESE en janvier 2025 a rendu un avis sur l’IA.
6 Près de 2,5 milliards d’euros du plan France 2030 y sont dédiés. https://www.economie.gouv.fr/actualites/strategie-nationale-intelligence-artificielle
7 Les personnes qui ne maîtrisent pas internet ou qui n’ont pas les moyens de s’équiper, seront laissées pour compte comme l’ont déjà souligné les rapports du Défenseur des droits en 2019, 2022 13 et 2024 et l’avis du CESE Droits sociaux : accès et effectivité.
8 Il s’agit d’une IA développée par l’équipe DataLab de la Direction interministérielle du 11 numérique (DINUM) pour aider les agents de l’administration à mieux répondre aux 12 demandes des Français.